Mini Fée.
Tu t’es réveillée en pleurant ce matin, parce que ta grande sœur n’était pas dans le lit à côté du tien.
Tu pleures beaucoup, tu dis ta peine, simplement, comme ça, quand elle est là, la tristesse, ou la colère, tu dis que tes oncles ne devraient pas fumer sous la fenêtre de ta chambre, tu adoptes un ton furieux, comme si la fumée intoxiquait tes peluches, mais tu sais et tu le dis, que tu crains surtout que le visage de tes oncles ne devienne gris.
Tu as pleuré dimanche, j’ai oublié pourquoi, la pinata, c’était pendant la tentative de faire éclater la pinata, une aile de papillon est tombée sur ton pied et tu avais mal, mais tu ne pleurais pas juste parce que tu avais mal. Je n’ai pas compris pourquoi tu pleurais autant.
C’était ton anniversaire.
Ma maman me disait que je pleurais à chacun de mes anniversaires, je ne voulais pas de chanson, je ne voulais pas de bougie. Mes frères disent que je suis encore comme ça.
Tu jouais, et tu pleurais, et tu mangeais des bonbons, et tu avais quatre baguettes magiques, tu pleurais parce que tu croyais que les copines allaient les prendre et les amener à leur maison, tu pleurais parce que ta sœur ne resterait pas toutes les nuits, tous les petits déjeuners, tous les ballons à gonfler, tous les ballons à remplir d’eau avec toi.
Tu portes des robes et elles se déchirent et tu me parles de les recoudre et j’acquiesque, en te confiant parfois qu’il n’y a que ton papa ou ta mamie qui savent coudre, et je ne crois pas pouvoir leur donner toutes tes robes décousues, trouées, délavées d’avoir joué dans un ruisseau.
Dans le ruisseau, tu t’approchais des quenouilles, tu trouvais qu’elles étaient dangereuses puisqu’elles ressemblaient au fuseau contre lequel Aurore s’était piqué, pour finalement se retrouver endormie pendant cent ans.
Quand tu pleures, je te prends dans mes bras, je me répète que je suis comme toi, je pleurais autant, petite, je pleurais pour tout, sans être capricieuse, sans être plus malheureuse qu’un autre enfant, je crois.
Je pleurais, je ne me cachais rien, comme maintenant je pleure parce que je te quitte, parfois, je ne me cache pas de mes pleurs, et j’aime bien que nous soyons comme ça, toutes les deux, des hypersensibles, qui, malgré toutes les larmes, les larmes du matin sans ta sœur, les larmes de la pinata tombée sur ton pied, mes larmes de mauvais souvenirs, malgré toutes les larmes personne d’autre que nous ne souffle mille pissenlits sans s’ennuyer, j’aime le penser.
Personne d’autre ne s’imagine avoir la même couleur de peau que les pouliches, personne d’autre ne répète que tout le monde devrait avoir un petit chat dans les bras et un gros chien en laisse et un chat sur la tête, un chat qui resterait toujours sur sa tête, parce que c’est bien, un chat sur la tête, pas besoin de casque de vélo ni de chapeau qui pique.
Personne d’autre n’est aussi heureux que nous, après avoir goûté un croissant aux amandes, pendant que ton petit frère dort dans mes bras et que tu m’apprends à souffler des baisers.