Alors que j’avais des contractions hyper douloureuses, j’ai pris une douche, pour me laver les cheveux. Mon mec ne croyait pas vraiment que j’avais mal, puisque j’avais la capacité d’aller sous la douche, mais ce n’était pas une question de douleur, c’était une question de confort, de besoin : je ne voulais pas de cheveux gras.
Une sonde urinaire et des cheveux propres
Je suis la personne la plus nulle du monde pour me coiffer, mais je voulais des cheveux propres, et j’avais aussi prévu dans ma valise un shampoing sec, pour m’assurer de pas sourire aux visiteurs alors que j’avais les cheveux brillants de gras (alors, oui, j’ai souri avec des cheveux presque propres, mais avec une sonde urinaire et un tire-lait bien branché sur mes seins, yeah).
Je n’ai pas demandé à personne de me prendre en photo. Quand j’étais seule avec ma fille, puis, deux ans plus tard quand j’étais seule avec mon fils, je l’ai fait, je me suis prise en photo, avec un visage fier et fatigué, un visage d’apprivoisement, de future maman, parce que je ne me suis jamais sentie maman en accouchant, je me suis jamais sentie maman avec un enfant qui refusait le sein, un enfant qui n’avait pas de nom, pas avant deux-trois jours ou même un mois.
Des seins-hamburgers et des robes tachées de lait
À l’hopital, je me rasais sous la douche et je me lavais les cheveux, mais je ne me changeais pas. Je portais ma jacquette d’hopital, toujours mal attachée. Je me promenais nue pied. Je n’étais pas belle. Je n’étais pas laide. Ce n’était pas important, finalement, d’être jolie, rien n’était vraiment important, sauf sortir de l’hopital, réapprendre à marcher sans avoir mal, et se presser les seins comme si c’était des hamburgers.
Même chez moi, je restais nue, ou je me promenais dans la rue, autant que je pouvais le supporter, en robe longue et noire ou turquoise, en robe tachée de lait ou de salive, en robe comme si c’était encore une jacquette qui recouvrait mon corps, plus douce, mais rien d’important, rien d’aussi important que d’être là, en future maman, en maman qui se cherche, en maman qui apprend à murmurer le nom de son enfant, à chanter une berceuse, à trouver la berceuse qui apaise son enfant, ma fille c’était Girls just wanna have fun, à la Glee, et mon fils, c’était Stand by me.
Liberté ou brushing?
Je suis encore une maman qui porte des vêtements tachés, j’achète plus souvent des cardigans pour ma fille ou des bottes pour mon fils que pour moi, je me lave les cheveux très souvent, je me prends en photo maquillée ou non, je vais au parc trois jours de suite dans la même robe. Je me donne la liberté d’être ni belle ni laide ni Instagram-compatible, c’est presque facile, pour moi, cette liberté, j’aime ne pas avoir à penser à quoi je ressemble, j’aime être là, j’aime ouvrir les bras, sans penser à des muscles ou à du gras, j’aime courir, j’aime soulever mes enfants et les faire tourner, tourner, je pense à moi, mais à eux, beaucoup, beaucoup, et penser à moi n’est plus penser aux joues de Kate Moss.
Je reste fascinée par tout ce qui touche l’apparence, ou à l’idée de se donner une apparence autre, à être une autre, à être la femme qui demande un brushing après son accouchement, je ne juge pas, je voudrais être elle, et être celle qui fait des exercices en Lululemon et poussette, je voudrais être celle qui aime les talons hauts, encore, et celle qui s’en achète pour la première fois, pour ne pas renoncer à ce qu’elle croit être important, que ce soit pour elle, pour son chéri, pour le gérant de son épicerie.
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